-20 Incorrecte seringue

Par Yvalin

12/15

Vacances… moment d’oisiveté, de congé ou absence, manque ? Vacance du pouvoir, bientôt, ou pouvoir en vacances ? Tiens c’est vrai, le pluriel change tout de suite l’acception que nous voulons donner au mot. Le nouveau président, dans 20 jours, partira-t-il en vacances ? Laissant l’idée d’une fonction, d’un pouvoir vacant ? Si je me rappelle bien c’est ce qu’avait fait celui qui va partir ( je n’arrive pas à imaginer qu’il puisse effectuer un second mandat). Tranquille, vous m’avez voulu, vous m’avez eu, à mon tour. Inepte.

Bon mes vacances à moi, disons plutôt mes congés, me font divaguer, rêver ; glander, se reposer … pas vraiment, je garde cela pour mes congés d’été, de vraies vacances, les doigts de pied en éventail, sans téléphone, sans internet ; je rêverai presque de pluie interminable pour rester au coin du feu, le chat sur les genoux, un livre qui glisserait bientôt des mains. Ajoutez une bonne odeur de … au choix, trop fatigué pour imaginer, préférer une chose ou une autre.

Pourtant quelle idée de se démener ainsi, quelle incongruité. Nous ne vivrons pas plus pour autant. À moins que cela n’aide à vivre. Une petite drogue par ci par là ne peut-elle aider à vivre ? « -mais monsieur, cela s’appelle un médicament ! ». C’est vrai ; mais alors qu’est-ce qu’une drogue ?

Comment répondre ? Cherchons. Ma table s’encombre de dictionnaires, un petit cahier m’aide à prendre des notes. Les références s’amoncellent, je cherche dans la bibliothèque les auteurs cités, j’ouvre une multitude d’onglet sur l’écran de mon ordinateur. 1912 : Une convention est votée à la conférence de La Haye pour contrôler la production, le commerce et l’usage de l’opium, de la morphine et de la cocaïne. La loi de 1916, adoptée en pleine guerre mondiale, réprime, outre « l’usage en société », le commerce et la détention frauduleuse de « substances vénéneuses », réservant leur seul usage légal à une médecine sous haute surveillance. « Monsieur le législateur de la loi de 1916, agrémentée du décret de juillet 1917 sur les stupéfiants, tu es un con. » écrira Antonin Artaud.

Pourtant au XIXème, la France, l’Angleterre sont de gros producteurs d’opium, des régies contrôlent toute la chaine de la production à la vente, au point que les taxes et profits dégagées alimentent le plus gros des budgets des colonies d’orient. Durant ce même siècle le vin Mariani (coca / alcool) et le laudanum (opium / alccol) est fortement usité, avec excès parfois ; nous parlerions aujourd’hui de « mésusage ». Alexandre le Grand, les empereurs romains trouvent dans l’opium un médicament courant et efficace. (cf le tableau chronologique extrait d’un rapport du sénat en 2003 : http://www.senat.fr/rap/r02-321-1/r02-321-12.html#toc2 ). 2700 ans avant notre ère le cannabis est utilisé en Chine comme sédatif et pour traiter l’aliénation mentale.

Tiens, tiens, l’aliénation … « trouble mental, passager ou permanent, qui rend l’individu comme étranger à lui-même et à la société où il est incapable de mener une vie sociale normale » in Petit Robert, article aliénation. La drogue pourrait-elle atténuer cette incapacité, agir comme un médicament, ou procurer ce décentrement de la personne par sa prise, mener au plaisir ?

Je ne saurai trancher. En ces quelques jours je n’ai pas le temps de lire ou relire.

Henri Michaux et par exemple son Connaissance par les gouffres (1961). Il essaye par lui-même diverses substances, essaye de comprendre la notion du temps, sa distorsion qui peut devenir un moment si crucial. Foultitude d’instants discontinus, « espace aux points innombrables », ou magie de l’extase où le temps et la conscience est Un, mélange d’instantané et d’éternité apaisé.

Pas plus que Les Portes de la perception d’Aldous Huxley, paru en 1954. Huxley essaye par divers moyens d’atteindre des états de conscience élevée dans une recherche théologique ou mystique ; l’un des moyens est la mescaline puis le LSD. Rien que le titre est tout un imaginaire.

Toute l’oeuvre d’Antonin Artaud, ainsi que celle de William S. Burroughs. Ah, Les Garçons sauvages, Le ticket qui explosa, La Machine molle qui vous transporte dans un univers sombre, décalé, déjanté. Inexplicable et trouble. Mis en lumière ensuite à la lecture de Junkie (1953) ou Le Festin nu (1959). Cette lecture de Burroughs à l’adolescence m’a permis d’avoir un recul « éclairé » sur l’usage des drogues illicites, le plaisir et le bien-être contrebalancé par la dépendance et la déchéance ; jusqu’où ne pas trop aller.

N’oublions pas Baudelaire, Thomas de Quincey, et Carlos Castaneda. L’Herbe du diable ou la petite fumée (1968) ainsi que Le Voyage à Ixtlan (1972) ou Le Don de l’aigle (1981) sont présentés, sinon pressentis, comme des canulars, des romans et non des études d’anthropologie sérieuses. Qu’importe, ne soyons pas bornés, l’histoire est belle, le chemin, les images intéressants. Sa « voie du guerrier » mérite réflexion.

Je m’éloigne, je diverge. Bibliographie courte mais déjà assez nourrie où vous pourrez ajouter pour le volet politique : L’An 01 de Gébé (1970) et Do It de Jerry Rubin (1970). Bibliographie néanmoins complète, donnant et adoptant divers points de vue sur l’usage et les possibilités des produits. Bibliographie qui ne dépasse pas les années 70 car je n’ai rien trouvé par la suite qui m’ait apporté quelque chose ; certainement pas les récits tel L’Herbe bleue (1971) ou Moi, Christiane F., droguée, prostituée… (1979), pseudo récits intimes sans aucun recul, ni aucune vision.

Pour revenir à la question du début : « mais alors qu’est-ce qu’une drogue ? », je pense que nous pouvons dire que c’est un produit qui modifie la perception de notre réalité propre. Dont les effets peuvent être très différents suivant les individus. Et il ne faut pas oublier, dans l’usage que nous en faisons, en tant que psychotrope récréatif ou abusif, toujours, en premier lieu, toujours il y a une notion de plaisir et bien-être.

 Peut-être devrions nous à présent réfléchir sur cette notion, ce besoin dans notre société moderne d’accéder au plaisir ?? Je pense que je laisserai cela à votre sagacité et vos nuits d’insomnies. Mon projet de salle de consommation n’est ni dans le Bien, ni dans le Mal, ni dans le plaisir, ni dans le soulagement. Il est dans la dignité humaine. Celle-ci rétablit, nous pourrons philosopher.

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