Par Yvalin
Bientôt les présidentielles ; quelques candidats commencent à répondre à des questionnaires ciblés sur l’AME, l’accès aux soins, les salles de conso, la dépénalisation, voir la légalisation. « J’ai entendu avec intérêt les propositions des maires de grandes villes, comme Marseille et Paris, visant à améliorer la réduction des risques en s’appuyant sur des travaux scientifiques et sur les exemples européens. Je leur laisserai donc la possibilité de mener des expérimentations pour améliorer la santé des usagers de drogue et réduire les nuisances dans nos quartiers. » dit François Hollande dans un interview à Seronet (http://www.seronet.info/dossier/presidentielles-2012-les-candidats-prennent-position).
Paris, Marseille, « -oui ça se fera, mais pas ici, il n’y pas de scène ouverte, pas vraiment de trouble. -Qu’est-ce que tu as dit, un Mac Do a posé un container de récup ?
Qui les remplit les usagers ou le personnel lorsqu’ils en trouvent ? Et au parking souterrain il y en a en accès libre ? -Il paraît, il faut que j’aille vérifier combien et où ils sont placés ; j’en ai aussi vu dans les toilettes de la fac de médecine. Presque personne n’y avait fait attention, et ce sont ces mêmes containers qui sont utilisés par les diabétiques. -Logique on utilise aussi leur seringue, enfin disons les mêmes. ». Ben alors, il y a donc des gens qui shootent dans la rue. Discrets, ils ne laissent pas trop traîner le matos, ils connaissent des lieux. À Marseille, dans certains endroits on peut suivre les usagers à la trace : ici la plaquette vide de Sub, un peu plus loin le carton du Stéribox, puis la cup ; rarement la seringue, jeté plus « proprement » ou conservé. Rien de cela ici. Alors ce ne serait pas utile ?
Une file active qui sur un an utilise en moyenne 250 seringues par personne, oui, oui, 250, et ce n’est qu’une moyenne, car cela va de dix par jour à une par semaine. Ce n’est rien ? Il ya deux Caarud en ville, je n’ai exploité que les chiffres du nôtre : et je le répète ce sont tout de même 125 452 seringues distribuées en 2010 à un peu plus de 450 personnes dont 207 vivent à la rue. Ils savent être discrets, et sont relativement responsables : il n’y a pas de lieu où des amoncellements de seringues usagées se rencontrent facilement. Nous ne sommes pas comme dans certains espaces proches de la Gare du Nord à Paris, des sanisettes pour ne pas les nommer, où c’est 5 à 700 seringues par jour qui sont collectées. En France, aujourd’hui, les seules salles de consommation existantes sont sponsorisées par JC Decaux !
Dimanche 1er avril – 0h30
Premier avril, je pouvais pas le louper ! Ce que vous avez lu au-dessus est exact, s’il faut un témoignage lisez le récit d’une journée ordinaire de Patrice, c’était il y a près de quinze ans (http://www.pistes.fr/swaps/7_73.htm) et rien n’a vraiment changé. Le comité du quartier de Barbès s’interroge, dans son bulletin du printemps 2009, sur les moyens à mettre en place pour arrêter le deal, les seringues dans les boites aux lettres, les lieux squattés. Le commissaire du 10ème insiste sur le travail de proximité et de concertation qu’il essaye de mettre en place depuis sa récente arrivée. Mais aucune solution ne semble se dégager. Ce qui n’empêchent pas ces riverains de s’interroger : « Des salles d’injection existent en Allemagne qui donnent de bons résultats. Prise sous surveillance donc. Mais nous ne sommes peut-être pas encore prêts à ce type de prévention, à en juger par les remous dans la salle provoqués par l’intervention de S.Roy. Les distributeurs, bien que tolérés, sont toujours situés trop près du domicile d’un père de famille. » (p3). Un tox, bon, aujourd’hui, ça passe. Mais un repaire de toxs … ça fait peur. En fait il faudrait les mettre en lien avec d’autres associations de quartier, par exemple entendre Carlos Askunze, porte-parole de la coordination des quartiers La Vieja, San Francisco et Zabalo à Bilbao où une salle est ouverte depuis plusieurs années : « la salle fait désormais « partie intégrante du quartier » – « Vous me demandez ce que je pense de la salle, mais aujourd’hui je pourrais presque vous dire que je n’ai plus rien à en dire, car si je sais qu’elle a ouvert et qu’elle fonctionne, je ne la remarque même plus !, ajoute Jon Aldeiturriaga. Ce que je peux dire, c’est qu’il n’y a pas eu d’augmentation de la délinquance autour de la salle, ni plus de drogués venant à Bilbao. C’est devenu un projet comme un autre pour venir en aide à des personnes en difficulté.« » déclarent-ils dans une très belle interview au Monde du 24 septembre 2010.
Alors toujours dans le doute sur la pertinence de l’ouverture d’une salle ? Non, non et non. Comment ça se passera, ce que nous y ferons ; est-ce que ce sera simple, éprouvant, voir angoissant. Je n’en sais rien. Mais je suis sûr qu’il faut continuer le projet, que ce soit nous, moi, d’autres qui le fassent aboutir, je m’en f… ce n’est pas une fin en soi. C’est un outil de plus dans la réduction des risques, dans l’accompagnement aux plus démunis, aux plus fragiles – quelle dérision – c’est une façon préventive d’éviter des dépenses de soins plus importantes – quel cynisme – de mettre en péril le public -quel mépris ; non, c’est tout simplement un outil, que je ne peux ignorer dans mon humanité, si celle ci se définit comme la capacité à ressentir ce qui nous est épargné.