Par Stanislas Morel
Pendant 100nuits, chaque semaine, un sociologue propose un contrepoint à un film de 100jours. Cette semaine, +67 de Jean-Gabriel Périot
Ce film retient l’attention pour plusieurs raisons. Tout d’abord par l’ambiguïté du statut respectif des images et du texte. S’agit-il d’un documentaire où figure une voix off ou, comme on peut plutôt le penser, d’un texte illustré par des images, à la manière de ces clips musicaux que l’on peut visionner sur Internet dans lesquelles un diaporama d’images accompagne la musique ? Ensuite, par la relation de sens énigmatique qui unit les images au texte, tantôt tellement inattendue (comme ces images pornographiques pour illustrer l’évolution du genre humain), tantôt tellement illustrative (un paysage enneigé pour l’hiver, un oiseau recouvert de mazout pour évoquer les risques de pollution) qu’on ne peut s’empêcher de penser que cette incongruité et cette redondance sont signifiantes, qu’elles sont l’expression esthétique de l’absurdité d’un monde où l’authentique disparaît derrière des clichés envahissants et où les messages sont répétés jusqu’à être vidés de leur sens par saturation. Enfin, par la voix posée, voire enjouée, et la ritournelle de la musique de fond, qui paraissent en complet décalage avec la gravité du message. Il résulte de cette distance qui parcourt le film un cocktail étrange d’impressions : étonnement, indignation, rire.
Si les sociologues cultivent la distance et provoquent parfois l’étonnement, voire l’indignation, ils sont rarement drôles. Lire la suite