-03 La canción del príncipe azul / La chanson du prince charmant

par La Señorita y Lúnula

 

Violence imprégnée.

 J’embrassai le livre très fort : dix ans de travail condensé en 609 feuilles. Mon œuvre, mon éternelle œuvre. Avec elle et dans elle j’avais transité. Et enfin, j’avais réussi à mettre un point final. Ma thèse, mon éternelle thèse. Un projet personnel sur la transformation de l’identité qu’expérimentent des femmes qui ont souffert de violences, à partir de leurs récits oraux, racontés à la première personne. Un travail qui veut donner force à ces voix à peine rétablies.

Après de longs mois d’hibernation, le moment arriva de me mettre en jeu publiquement. D’explorer des réactions, des sensations, des confrontations. De reconnaître que dans ce travail il y avait un truc qui partait de moi, le partir de soi , de ma propre expérience de violence. Violence vécue dans le passé en personne, imprégnée et imprégnant les pages de l’étude.

Relié, gravé. Contenant des récits de souffrance et d’espoir. Je voulais que ma mère et mon père le voient. Le présenter en société. Traverser les murs de ma maison, crier « c’est cela que j’étais en train de faire », partager « c’est pour cela que j’ai volé tant d’heures à notre échange », offrir « reçois mes pages, elles font partie de moi… ».

Les premiers mots, les remerciements. Ma mère, mon père, ses copines, ses copains, ils s’assoient autour d’une table. Ma sœur, après une première lecture, émue et au bord des larmes, elle me demande de partager en public ces premières pages. J’accepte avec pudeur. Si je veux crier et que les femmes crient à travers moi, c’est le premier pas.

En silence, ils écoutent le récit des remerciements. J’offre à mon compagnon -nerveux, en face de moi pendant la lecture- le souvenir d’autant d’effort ressenti et partagé. Après la lecture, les compliments, les questions, quelques inquiétudes. Aussi quelques commentaires moqueurs sur la souffrance de mon compagnon pendant des années, commentaires que j’arrive à trouver même drôles. Après un laps de temps gênant, par mon rôle principal, j’essaie de dévier l’attention vers les femmes et leurs récits.

Alors un ami de mon père prend la parole. Il hausse la voix pour signaler, que le vrai artisan de « l’œuvre » a été mon compagnon… sans lui, nuance-t-il, sans son soutien, elle n’aurait pas été possible.

« Il a tout cassé, il a tout cassé… », je le ressens. Ma tante l’appelle machiste. Et moi je veux l’appeler traître. Dans ma comparution publique, dans ma sortie du placard, ma thèse… Je suis toute remuée mais je ne dis rien. Plus tard dans la soirée j’explique à ma mère et à mon père le pourquoi de ma colère, de ma peine. Ils ne comprennent pas… « C’est quelque chose de structurel » je leur dis. Mes parents accordent de moins en moins d’importance à cela. Et moi, avec le temps, de plus en plus. C’est aussi quelque chose de personnel, je me dis, et je me reconnais. C’est un plus du partir de soi.

Lúnula

Violencia impregnada

 Abracé el libro bien fuerte: diez años de trabajo condensados en 609 folios. Mi obra, mi eterna obra. Con ella y en ella había transitado. Y por fin, había logrado poner el punto y final. Mi tesis, mi eterna tesis. Un proyecto personal sobre la transformación de la identidad que experimentan mujeres que han sufrido violencia, a partir de sus relatos orales contados en primera persona. Un trabajo que quiere dar relieve a sus voces apenas recién recuperadas.

Tras largos meses de hibernación, era el momento de ponerme en juego públicamente. De explorar reacciones, sensaciones, confrontaciones. De reconocer que en ese trabajo había un partir de mí, el partir de sí, de mi propia experiencia de violencia. Violencia vivida en el pasado en primera persona, impregnada e impregnando las páginas del estudio.

Encuadernada, grabada. Continente de narraciones de sufrimiento y esperanza. Quería que mi madre y mi padre la vieran. Presentarla en sociedad. Traspasar los muros de mi casa, gritar “esto he estado haciendo”, compartir “por esto he robado tantas horas a nuestro intercambio”, brindar “acoge mis páginas, son parte de mí…”.

En las primeras letras, los agradecimientos. Mi madre, mi padre, sus amigas, sus amigos, se sientan en torno a una mesa. Mi hermana, tras una primera lectura acongojada por las lágrimas, me pide compartir en público esas páginas iniciales. Pudorosa, acepto. Si quiero gritar, y que las mujeres griten a través de mí, este es el primer paso.

Silentes, escuchan el relato de los reconocimientos. En ellos ofrezco a mi pareja –nervioso, frente a mí durante la lectura- el recuerdo de tanto esfuerzo compartido y sentido. Tras la lectura, brotan las alabanzas, las curiosidades, varias inquietudes. Algún comentario jocoso sobre el padecer durante años de mi compañero, que hasta me resulta gracioso. Después de un lapso incómodo, por asumir el protagonismo, trato de desviar la atención a las mujeres, a sus relatos.

Entonces, un amigo de mi padre, toma la palabra. Su voz se eleva para señalar, que el verdadero artífice de “la obra” ha sido mi pareja… sin él, matiza, sin su apoyo, ésta no hubiera sido posible.

Lo ha roto todo, lo ha roto todo”, siento. Mi tía le llama machista. Y yo le quiero llamar traidor. En mi comparecencia pública, en mi salida del armario, mi tesis… Me revuelvo por dentro, pero me callo. Avanzada la tarde, explico a mi madre y a mi padre el por qué de mi ira, de mi desazón. No lo entienden… “Es algo estructural”, profiero. Mis padres le quitan hierro. Y yo, con el paso del tiempo, se lo añado. También es algo personal, me digo, y me reconozco. Es un más al partir de sí.

Lúnula

2 réflexions au sujet de « -03 La canción del príncipe azul / La chanson du prince charmant »

  1. Moi aussi un jour j’ai réussi un examen. Ma mère m’a dit: « Tu dira bravo à Z., c’est grâce à elle ». En plus depuis je dois garder les enfants à la maison.
    Du coup je me demande si les violences faites aux femmes sont une forme spécifique de la violence, ou si elles en sont une des formes dominantes.

  2. Yo también aprobé un día un examen. Mi madre me dijo “Felicita a Z, es gracias a ella”.
    Encima desde entonces me toca cuidar los niños en casa.
    De pronto me pregunto si las violencias contra las mujeres son una forma especifica de violencia o si son una de las formas dominantes.